Le chœur des miracles

- Pour de bon ? La dernière fois que je l'ai vue, c'était il y a longtemps. Si je me souviens bien, elle était belle. Elle me faisait la cour. Rectangulaire, avec un grand arbre au milieu et préau sur le côté. Elle avait aussi une bibliothèque de mille couleurs et des salles de classe qui sentaient bon la colle.

Pour revenir à la cour, quel lieu magique. Tout s'invente et les miracles apparaissent. Le temps s'arrête. Elle semble être la plaine la plus vaste du monde et son arbre gratter le ciel. Elle se fait cratère, arène, circuit, forêt, château, océan. Nul n'est plus magique. Parfois des rides de craie au sol. Parfois des brouhahas de jeux collectifs. Parfois une cloche qui a le pouvoir de remplir ou de vider. Cet arbre est le plus beau du monde. Sur le côté, le préau, le plus protecteur au monde. Je crois me rappeler un bac à sable, père des aventures les plus folles du monde. La pluie, le vent, le Soleil, rien ne l'altère, cette cour. Les fenêtres sont des centaines d'yeux. Et les quelques verdures de soyeux bijoux. La vie est là quand la cour est pleine. Elle est là aussi quand elle vide. Certains - peut-être en fais-je partie - ont déjà pleuré en ce lieu. Mais personne ne lui en veut jamais. Ce n'est pas de sa faute. Tout était si différent. Si propre, si innocent. Si facile, si charmant. En couleurs, en noir et blanc. Photos à l'appui. Les cours sont de ces lieux habillés de silence, mais dont le silence est un grand bruyant.

C'est décidé, je veux la voir.

- C'est fait. A l'instant."